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MISE A JOUR 07.09.18

TADJIKISTAN

du 11 au 22 août 2018

parcouru 1668 km dont 784 km de piste


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11 août 2018 Batken (Kirghizstan) - Sarvoda (Tadjikistan)
Jour de passage de douane, nous démarrons donc peu après 8 heures. En entrant dans la ville de Batken, nous arrivons face à une rue principale fortement encombrée par le marché. Heureusement un carrefour avec feux nous offre une échappatoire sur la droite en direction de la frontière dans une campagne fertile.

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Nous arrivons au poste kirghize vers 8 h 45 et seul un camion nous précède. Les formalités administratives sont vite faites mais le douanier ne reprend pas le formulaire russe pour faire la sortie du quad. Il indique que cela n’est pas nécessaire puisque nous revenons dans son pays après le Pamir. Une visite d’inspection de Babar est surtout justifiée par la curiosité et les fonctionnaires font de nombreuses photos avec leur téléphone portable. A 9 h 30 nous nous présentons au poste tadjik où nous sommes accueillis avec des mots de bienvenue. Nous devons payer une taxe d’entrée pour la pollution, qui s’élève compte tenu du poids de Babar, à 150$US. Les formalités administratives sont vite effectuées et il n’y a pas de visite du véhicule ! Peu après 10 heures nous entrons dans le pays.
Le Tadjikistan est le plus petit pays d’Asie centrale avec une surface de 143'000 km2, dont 90% de relief accidenté, pour une population de 8'300'000 d’habitants. Plus de la moitié du territoire est au-dessus de 3'000 mètres d’altitude. La population est constituée de 65% de Tadjiks, de 25% d’Ouzbeks, de 4% de Russes et d’ethnies minoritaires. La langue officielle est le tadjik, qui fait partie des langues d’origine perse, cas unique en Asie centrale. Peu après son indépendance, le pays a été déchiré par une guerre civile qui a duré de 1992 à 1997, faisant plus de 60'000 morts. Elle opposait les communistes d’une part, aux indépendantistes islamistes alliés aux libéraux. Elle s’est terminée dans le cadre de négociations parrainées par l’ONU, mais ses traumatismes restent présents dans le pays. Aujourd’hui le pays est dominé par le parti démocratique populaire (post-communiste) dont est issu le président (contraire envisageable), qui fut réélu plusieurs fois. Le parlement comprend deux chambres de 33 et 63 membres et une demi-douzaine de représentants des partis d’opposition y ont été élus. Le pays, déjà très pauvre au moment de son indépendance, a été pénalisé par la guerre civile qui a d’ailleurs poussé au départ l’essentiel de la population d’origine russe (plus du tiers de la population en 1991). Son économie redécolle depuis le début des années 2000 et le pouvoir d’achat annuel comparé moyen correspond à environ 2’000$ par habitant.
Nous pénétrons, près de la ville d’Isfara, dans la Fergana tadjik, une des régions les plus fertiles du pays.

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Nous descendons sur la vallée de Khujand, irriguée par le barrage du Qayroqqum Reservoir. C’est une plongée dans des terres de vergers, de cultures maraîchères, de fourrages.

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Nous nous habituons à connaître le président dont les images, en portrait ou en pied, sont omniprésentes dans les localités.

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Les routes sont excellentes et les bâtiments publiques et privés bien entretenus.

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Nous faisons une halte à Istaravshan, ville de 60'000 habitants au pied nord de la chaîne de montagne des Turkestan qui s’élève à plus de 4'000 mètres. Nous visitons la vieille ville, quasi déserte, où se trouve la belle mosquée Kok Gumbaz du 15ème siècle, devenue par la suite école coranique qui accueillait plus de 1'000 élèves.

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Ce n’est qu’en quittant la cité que nous traversons un énorme bazar où Babar ne trouve aucune place pour s’arrêter.

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Nous nous élançons ensuite à l’assaut de la chaîne des Turkestan avec une verdure qui se concentre à proximité des cours d’eau.

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Un tunnel routier permet de franchir le Shariston Pass avant de descendre dans un val abrupt vers la vallée du même nom.

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Nous remontons ensuite une nouvelle vallée étroite avant de trouver finalement un bivouac en bordure du village de Sarvoda, à l’entrée d’une clinique.

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12 août 2018 Sarvoda - Dushambe - Gashi

Beau, puis vent de sable et grisaille dès Dushambé, 30°C l’après-midi.
Démarrage vers 9 heures, pour poursuivre notre traversée nord-sud des chaînes de montagnes qui séparent le nord du pays de la région centrale et de la capitale. Coincé entre court d’eau torrentueux et flancs des montagnes la route n’offre pas d’échappatoire si ce n’est dans de rares villages.

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Des mines de charbon génèrent un cortège de camions qui sont chargés au-dessus des ridelles.

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A 2'700 mètres d’altitude nous atteignons un tunnel étroit et sombre qui permet de franchir les montagnes du Anzob Pass. La vallée dans laquelle il débouche n’est pas plus ouverte que les précédentes, et le trafic des camions, jusqu’à un dépôt intermédiaire, redouble.

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La carcasse d’un camion fraîchement accidenté ne ralenti pas les chauffeurs qui dépassent sans aucune visibilité.

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La route est protégée des chutes de pierres et avalanches par de nombreuses galeries ou petits tunnels avant de déboucher dans une zone plus arborisée et verte et plus touristique.

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Occupée par de nombreuses villas récentes ou en construction, entourées d’installations sportives et de piscines. Des parcs rocheux un peu kitsch, peuplés de faune en béton, confirment que la région doit être un lieu de vacances et villégiature pour les habitants de Dushambé.

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Nous atteignons la capitale, sous une atmosphère grise, en fin de matinée et mettons tout de suite le cap sur notre premier objectif : le supermarché franchisé Auchan. Après tous les petits magasins villageois et bazars, un tel déballage de produits et éblouissant. Il y a peu de produits français, mais de nombreux aliments comparables d’origine russe. L’adaptation aux goûts… et soif d’ici est frappante : des bouteilles de whisky écossais ou irlandais de 4,5 litres !

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Au rayon boucherie, les morceaux de gras des queues géantes des moutons d’ici se vendent pour être placés entre les morceaux de viandes sur les chachliks (grandes brochettes).

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C’est un autre endroit qui nous intéresse, celui où se trouve un filet de bœuf que nous emportons pour l’équivalent d’une quinzaine de francs. Nous traversons ensuite la ville, striées par de grandes avenues arborisées pour gagner le quartier central regroupant de nombreux bâtiments modernes monumentaux entourés de fontaines et de parcs.

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Parmi ceux-ci l’hôtel Hyatt près duquel d’autres voyageurs ont bivouaqué sur un parking. Finalement pourquoi ne pas s’offrir un extra au restaurant du prestigieux établissement. Et Babar fait une entrée remarquée, après contrôle au miroir, sur le parking de l’hôtel où nous allons, pour égayer l’étouffante grisaille, savourer un excellent repas pour une soixantaine de francs.

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Pour échapper à la grisaille et à la chaleur, nous quittons la ville en milieu d’après-midi, en direction sud-est, pour trouver la montagne et un peu de fraîcheur.

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Après une quarantaine de kilomètres, à proximité de Gashi, nous atteignons l’altitude de 1'300 mètres, sur la vieille route qui évite un tunnel. Nous nous installons en retrait de celle-ci pour la nuit. La pluie orageuse qui viendra pendant celle-ci ne perturbera pas notre repos parmi les vergers et moutons. Le thermomètre descendra agréablement à 17°C.

13 août 2018 Gashi - Anjirob
Nous poursuivons peu avant 9 heures sur notre petite route qui grimpe encore 200 mètres d’altitude avant d’atteindre un plateau sur lequel se trouve une cimenterie. Nous redescendons ensuite côté sud et rejoignons la grande route après la sortie du tunnel.

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Notre route traverse ensuite une retenue sur la rivière Vakhan et, après avoir traversé un nouveau tunnel, débouche sur les magnifiques vallonnements de savane arborisée qui entourent le Norak Reservoir, un lac artificiel d’une vingtaine de kilomètres de longueur.

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La grisaille du ciel atténue malheureusement la beauté de ce paysage. Les pentes, qui entourent les villages et descendent en direction du lac, sont plantées de grands vergers.

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Nous quittons ensuite cette belle région de collines pour descendre en direction de Danghara et des plaines fertiles du sud-ouest du pays arrosées par la rivière Vakhsh. Notre itinéraire emprunte la route sud en direction de la vallée du Panj, la route nord étant trop mauvaise et munie de ponts trop faibles pour Babar. Danghara est la ville d’origine du président, qui a déclaré 2018 année du tourisme. Nous sommes d’ailleurs salués, dans chaque localité par les cris des enfants et les signes des adultes, comme des hôtes d’honneur.

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C’est dans cette région que les intégristes islamistes ont choisi d’attaquer, il y a deux semaines, un groupe de cyclotouristes occidentaux, faisant quatre morts, dont un zurichois, et deux blessés. Un petit monument, présentant les condoléances du peuple du Tadjikistan aux familles des victimes, a été érigé sur les lieux de l’attentat, à une quinzaine de kilomètres au nord de Danghara. Nous nous y arrêtons pour un instant de recueillement et sommes salués par un policier qui garde l’endroit.

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Depuis cette ville la plaine est couverte d’immenses champs irrigués de coton qui commence à fleurir.

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Plus au sud la région redevient plus aride, céréalière et de pâturage extensif sur les collines. Nous découvrons, en bord de route, des vendeurs de viande d’agneaux qui offrent des quartiers, demi-bêtes ou bêtes entières, enveloppées dans des tissus et pendues à des étals ou des arbres.

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A l’approche de la ville de Kulob, 90'000 habitants et centre important de la production de coton, les zones irriguées se multiplient à nouveau. Nous traversons la ville par la grande avenue centrale bordée de bâtiments officiels et de commerces modernes et bien entretenus. Le trafic des véhicules et des piétons est dense et les boutiques très animées.

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Après la ville, nous embarquons deux autostoppeurs français, étudiants à Lyon. Ensuite la route se détériore en gravissant la chaîne de montagne Hazrati Shoh, qui s’élève entre 2'500 et 3'000 mètres et est le dernier obstacle avant la vallée du Panj. Avant d’arriver sur un haut plateau céréalier, à 2'000 mètres, où les moissons vont bon train, la route devient piste pour contourner un canyon de plus de 100 mètres de profondeur qui a emporté son assise.

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Des troupeaux cherchent l’ombre au pied des falaises de sable.

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Nous retrouvons ensuite une excellente route pour traverser la localité de Shuroobod et descendre par une chaussée large et récemment taillée dans la montagne vers la vallée du Panj cachée dans la grisaille.

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Après avoir laissé, comme annoncé, nos autostoppeur poursuivre leur chemin, nous quittons la route principale. Nous stoppons sur une arrête de colline, à 1'100 mètres d’altitude, au-dessus du village d’Anjirob. Nous distinguons par moment, en contrebas à quatre kilomètres dans la grisaille, le Panj qui marque la légendaire frontière Afghane.

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14 août 2018 Anjirob - Qala I Khumh

Beau dans la grisaille qui empêche de voir les montagnes, 28°C à 9 heures, 30 en journée.
La journée commence par une montée sur le toit pour nettoyer les panneaux solaires qui ne produisent pas beaucoup. Est-ce la grisaille ambiante ou la poussière qui freine les rayons ? mieux vaut donner un petit coup de poutze.

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Vers 9 h 15 nous démarrons pour descendre dans la vallée du Panj qui fait frontière entre le Tadjikistan et l’Afghanistan sur les 1'125 km de son cours. Il prend naissance à la jonction des rivières Wakhan et Pamir, dans le massif du même nom près de Langar. Il perd son nom, après avoir drainé un bassin montagneux de plus de 110'000 km2, en rejoignant le fleuve Vakhsh pour constituer l’Amou Daria qui irrigue le Turkménistan, l’Ouzbékistan et la mer d’Aral. Le débit moyen du Panj atteint plus de 1'000 m3/sec lorsqu’il devient l’Amou Daria. Issu essentiellement de la fonte des glaciers du massif du Pamir et de l’Hindukush il connaît ses plus forts débits entre juin et août.

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Il constitue une barrière naturelle difficilement franchissable à cette époque entre les deux pays riverains. Nous atteignons le fond de la vallée et retrouvons ce compagnon, grisé par un abondant limon, qui va nous accompagner sur plus de 700 kilomètres en direction du massif du Pamir.

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Nous allons devenir des voyeurs, scrutant au-dessus des flots la rive afghane interdite aux touristes par la situation sécuritaire de ce pays.

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Route du Tadjikistan et de l'autre côté du fleuve : l'Afghanistan

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La structure de la vallée, entourée de sommets dépassant 4'000 mètres de part et d’autre, est identique sur les deux rives.

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Les villages sont implantés sur les cônes d’éboulis de la montagne, ou les banquettes laissées par le fleuve dans les endroits plus larges, arrosés par des rivières dont les débits peuvent varier fortement.

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Les cultures et arbres sont irrigués par de nombreux canaux. Lorsque la vallée est plus large, des vergers sont plantés. Après une vingtaine de kilomètres nous voyons un des rares ponts qui traversent le fleuve.

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Ils sont utilisés par les organisations internationales d’entraide dont nous apercevons les tentes à proximité de certains villages afghans. Il n’y a pas de trafic commercial ou humain entre les deux rives sévèrement gardée. La rive tadjik est surveillée dans ses espaces les plus larges par des miradors et nous croisons souvent sur la route des patrouilles de trois ou quatre soldats.

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Des places d’atterrissage pour hélicoptère sont tracées sur la route ou aménagées à proximité.

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Notre route est bonne sur 80 kilomètres avant de devenir piste parfois beaucoup plus étroite et sinueuse.

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Côté afghan une petite piste continue a été aménagée dans des conditions suscitant l’admiration au long des parois rocheuses.

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Elle est parcourue parfois par une moto ou plus rarement par une camionnette ou une jeep. La majorité des déplacements que l’on observe se font à pied et avec des ânes pour le transport.

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Lorsque la vallée se rétrécit, il n’y a plus de village ni d’un côté ni de l’autre et seuls les pierres tombées des parois ou des ponts emportés par les crues et les gravats donnent du relief à la piste.

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La route redevient asphaltée sur les tronçons les plus faciles à entretenir. En fin de matinée nous croisons un couple d’argovien avec un grand camping car normal et partageons un verre. Plus loin un homme agite ses bras pour nous stopper : c’est notre ami motard Maarten, qui après un accident heureusement sans gravité pour lui a chargé sa moto dans une navette et part la réparer à Duschambé. Nous stoppons en fin de journée dans la sympathique petite ville de Qala i Khumh, où nous installons Babar pour la nuit dans une petite rue vers l’école.

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Un verre sur une terrasse qui surplombe la rivière bleue qui se jette dans le gris du Panj, une balade en ville et dans le magnifique et minuscule parc avec de grands arbres qui marque le centre finit cette journée.

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15 août 2018 Qala I Khumh - Voznavd
Beau, la grisaille se dissipe irrégulièrement, 25°C à 7 heures, 35°C en journée.
Nous sommes réveillées à 5 h 30 par un gamin qui joue au ballon dans la cours d’école. L’avantage c’est que nous partirons de bonne heure. Le soleil perce presque la grisaille nous laissant mieux voir montagnes et villages afghans entourés de leurs champs séparés par des murs en pierre sèche.

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Cette fois nous sommes sur la piste et seules les traversées de villages sont goudronnées pour réduire la poussière.

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Elles sont aussi souvent bordées de murs en pierre ou de clôtures de branchages qui marquent les limites de propriétés.

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Les meules de fourrage marquent l’avancement des récoltes. Côté afghan, les maisons sont de type himalayen, souvent groupées en terrasses avec des toits plats étanchés tandis que du côté tadjik les toitures à deux ou quatre pans, en tôle ou fibrociment, couvrent la quasi-totalité des maisons.

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Le Panj s’élargit parfois entre des bancs sablonneux tandis que d’autres fois il est resserré entre les rochers et tumultueux à décourager le plus téméraire des rafteurs. Nous croisons de temps en temps, avec admiration, des cyclotouristes qui n’ont été découragés ni par l’attentat ni par les grandes déclivités du Pamir.

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Nous découvrons le chantier herculéen de construction de la piste côté afghan, dans un promontoire rocheux de 200 mètres de longueur qui tombe à pic dans le fleuve.

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Un compresseur alimente le marteau pneumatique de deux ouvriers aguillés dans les rochers au-dessus du Panj.

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Plus loin d’autres charges du sable dans une camionnette pour égaliser la piste… des rudes journées de labeur manuel comme les connaissaient nos grands-parents.

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Nous croisons peu de camion sur cette route autrefois très fréquentée par des transporteurs de marchandises chinoises. Leurs semi-remorques fabriquées à base de tôles de containers ne nous empoussièrent qu’une à deux fois par heure. Il y a sans doute de meilleurs itinéraires vers l’Ouest.

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Nous stoppons entre les grands arbres sur la place d’un village qui est traversé par une belle rivière qui se précipite vers le Panj.

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Son eau est naturellement captée pour irriguer les champs, mais aussi pour rafraîchir la place ombragée et abreuver ses parasols naturels. Un hôtel propret, avec épicerie, est bâti là et le propriétaire utilise la petite cascade qui parcourt sa terrasse pour réfrigérer les boissons.

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Nous franchissons le pont qui enjambe la rivière pour découvrir bientôt des tronçons de la piste afghane qui donnent le vertige tandis que la nôtre devient plus étroite et caillouteuse.

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Au sortir d’un virage nous sommes stoppés par les reste de l’incendie d’une semi-remorque dont la cargaison de pneus et de ballots a pris feu, sans doute suite à un problème de freins.

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Les ouvriers finissent de déblayer un passage et nous roulons prudemment entre les carcasses de pneus consumées. Les sommets enneigés que nous apercevons parfois dépassent maintenant les 5'000 mètres et augmentent l’aspect étriqué de la vallée.

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La verdure des champs et arbres fruitiers des villages paraît d’autant plus éclatante et accueillante et les abricots qui sèchent sur les toits des étables nous allèchent.

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Nous longeons parfois des parois verticales de plus de 50 mètres de hauteur qui laissent à peine place pour la piste.

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D’autrefois nous longeons des ouvrages de protection contre les chutes de pierres que celles-ci ont réduits à des gaufrettes tombées du paquet.

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En fin d’après-midi, nous sommes stoppés par les cris de Ruedi et Karen, le couple rencontré à Osh avec un bus VW, que nous savions devoir croiser sur cet itinéraire et qui sont arrêté dans le verger d’un relais routier. Nous sommes heureux de les retrouver et parquons Babar en constatant que le boulon de l’amortisseur droite est de nouveau cassé. La réparation est effectuée, puis bonne soirée avec nos amis belgo-hollandais et avec la bonne bouteille de Chardonnay de Bourgogne amenée par Karen.

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16 août 2018 Voznavd - Khorog - Sist

Nous sommes à 1755 mètres d’altitude et la nuit a été bonne malgré le passage de quelques camions. Après quelques photos avec nos amis nous démarrons vers 7 h 30 sous un soleil qui fait plaisir à voir.

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Après une vingtaine de kilomètres nous constatons que le boulon de l’amortisseur droite est de nouveau courbé ! J’ai réparé hier soir, malgré l’aide d’un gars sympathique du relais, et il manquait une rondelle pour tenir mes caoutchouc silentbloc. Je roule prudemment jusqu’à un endroit ombragé par les rochers où la piste est assez large pour s’arrêter.

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Changement de boulon, confection d’un nouveau silentbloc, et nouvelle réparation pendant laquelle nos amis de Dresde surviennent avec leur bus VW tous-terrains.

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Nous échangeons sur l’état des pistes d’où ils viennent et celles où nous allons, puis chacun reprend sa direction.
Les bordures du fleuve offrent de belles plaines dans la région de Rushan et là aussi les récoltes battent leur plein.

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Nous atteignons Khorog, 30'000 habitants, la capitale du Gorno-Badakshan Autonom Oblast, en abrégé GBAO. Cette province sous régime spécial couvre 40% de la surface du Tadjikistan (1,5 fois la Suisse) mais est peuplée par seulement 3% de la population du pays soit 220'000 habitants. Il faut un permis spécial pour y accéder. Elle compte les plus hautes montagnes de la région du Pamir, parmi lesquelles trois sommet de plus de 7'000 mètres dont le pic Ismaïl Samani à 7'495 mètres. La région est souvent isolée du reste du pays par les chutes de pierres et avalanches. Elle l’est aussi politiquement et le gouvernement tadjik investit dans la région de manière proportionnée à la population. C’est l’Agha Khan, chef de la communauté des musulmans ismaélites (20 millions de fidèles), et sa fondation qui soutiennent la province, berceau vraisemblable de cette branche particulière de l’Islam. Les bases de la doctrine des ismaéliens sont ésotériques et prône l’ouverture aux autres et au monde moderne. Elles recèlent aussi des liens avec la nature et le chamanisme qui a précédé les grandes religions dans cette région. Les temples sont souvent décorés de cornes de moutons sauvages Marco Polo. Un campus de l’université d’Asie centrale a été ouvert dans la ville, par la fondation Agha Khan, en 2017.

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A l’entrée de Khorog nous sommes dépassés par une voiture qui nous stoppe. Ce sont des journalistes d’une chaîne de télévision russe qui réalisent une émission sur les touristes qui visitent la région. Je réponds brièvement à leurs questions et nous reprenons la route.

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Après une escale ravitaillement pain et diesel dans la ville, nous décidons de poursuivre notre remontée de la vallée du Panj.

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Après une dizaine de kilomètres nous admirons une belle cascade du système d’irrigation qui chute en bordure de piste. Nous décidons d’y faire le plein d’eau et profitons de sa hauteur pour remplir le ventre de Babar.

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La route est parfois recouverte d’un vieil asphalte, parfois simplement en piste. La vallée se rétrécit et le Panj dont le lit ne fait parfois qu’une quarantaine de mètres de largeur, s’agite pour écouler tout son volume d’eau grise.

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Après avoir passé un poste de contrôle de la police avec inscription des identités, nous commençons à chercher un lieu de bivouac, ce qui n’est pas facile dans cette partie étroite de la vallée. C’est finalement à l’entrée du village de Sist que nous trouvons, au crépuscule, une place de bivouac au long d’un grand et vétuste arrêt de bus qui empêchera que l’on nous voie depuis la rive afghane. Les militaires, qui déplacent parfois les touristes vers leurs camps, demandent que l’on évite cette exposition aux regards de l’autre rive.

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17 août 2018 Sist - Zumudg
Nous avons salué hier soir nos voisins d’en face qui entretenaient le grand jardin de leur belle maison et leur avons demandé la possibilité de dormir là, ce qu’ils ont tout de suite accepté, proposant thé et nourriture si nécessaire. Ils sont à nouveau au jardin et nous parlons un peu des conditions météo de l’endroit. Il y a 80 cm de neige en hiver et les routes sont souvent bloquées plusieurs jours ou semaines par la neige, les avalanches et les chutes de pierres mais les habitants y sont habitués. L’été est par contre très chaud et les fruits et légumes poussent à merveille.

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Notre voisine ne veut pas être prise en photo en tenue de jardin mais son mari accepte volontiers fier de ses pommiers.

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Je visite ensuite le quartier, émerveillé par le circuit de petit ruisseau qui coule d’une propriété à l’autre, se faufilant à travers chemin et palissades de branches ou dans des passages soigneusement aménagés dans les murs.

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Le large lit pierreux de la rivière voisine, qui doit connaître des fortes crues mettant en danger les maisons, a été assainit, et le pont refait en novembre 2010 par financement de la Commission Européenne et de Focus, une des œuvres d’entraide de l’Agha Khan.
Nous quittons Sist vers 9 heures et renonçons à prendre la plus belle autostoppeuse jamais rencontrée, et sa mère, qui se rendent plus haut dans la vallée. C’est la mesure de précaution décidée suite à l’attentat, contrairement à l’habitude, nous ne prendrons pas d’autostoppeur au Tadjikistan. Les petits villages sont maintenant cernés de murs de pierres sèches qui déterminent les parcelles et d’éboulis rocheux qui les séparent les uns des autres. L’univers minéral prend largement le pas sur le végétal qui paraît ponctuellement comme un joyau. Pourtant des troupeaux de chèvres et moutons parcourent la vallée en quête de pitance.

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A 100 kilomètres au sud de Khorog, le Panj fait un virage à 90° en direction de l’Est Nord-Est, autour du massif du pic Mayakovskiy (6095 m) et, de manière surprenante la vallée s’élargit. En face sur la rive afghane s’ouvre une vallée qui conduit à Fayzabad, 50'000 habitants, capitale de la province afghane du Badakhchan.

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Nous nous retrouvons sur l’un des itinéraires principaux de la route de la Soie qui après avoir suivi le Wakhan partait ici sur l’Afghanistan pour aboutir à Mashad en Iran et poursuivre vers l’Ouest. La ville d’Ishkashim marque ce carrefour de vallée et connaissait, avant la guerre afghane, un grand marché qui, sur une île au milieu du pont qui relie les deux rives, réunissait les habitants des deux pays.

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Les tadjiks sont une ethnie de souche indo-européenne persanophone, qui occupe majoritairement les deux rives du Panj. Ils constituent 65% de la population du pays qui porte leur nom et 25% de la population de l’Afghanistan. La guerre civile qui bouleverse ce pays depuis plusieurs décennies, a conduit à une fermeture assez étanche de la frontière, empêchant la poursuite d’échanges intenses et séculaires entre populations proches et culturellement sœurs.
Nous poursuivons notre remontée de la vallée du Wakhan et entrons dans le fameux corridor créé dans la 2ème moitié du 19ème siècle pour séparer les territoires conquis par les empires russes et britannique. Les premiers se sont arrêté au fleuve Panj qui marque la frontière avec l’Afghnistan et le corridor tampon.

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Mais à 25 kilomètres au Sud, les sommets de L’Hindukush, à plus de 6'000 mètres, marquent déjà la frontière avec le Nord du Pakistan limite des territoires de l’empire des Indes. Mais la route de la Soie avait dès le 2ème siècle avant Jésus-Christ traversé cette vallée et entraîné la construction de deux forteresses pour contrôler le trafic et garantir la sécurité des caravanes. Kah-Kakha a été construite sur des rochers dominant le Panj et sa plaine d’une cinquantaine de mètres. La forteresse avait une superficie de 700 mètres par 200, protégée par des murs en argile de 2 à 3 mètres d’épaisseur et de 6 à 8 mètres de hauteur renforcés par 56 tours. Elle a été utilisée jusqu’au 8ème siècle, période des premières conquêtes arabes.

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Une autre forteresse, beaucoup plus grande et construite en pierre, domine la vallée de 400 mètres à une trentaine de kilomètres plus loin. Yamchun, qui date aussi du 2ème siècle avant notre ère, est adossée à la chaîne des Shakdara (+de 6000 m) et couvrait une surface de 75 hectares avec des bastions progressifs au fil de la pente. Ses murs successifs d’une épaisseur de 1,5 mètre pour plus de 3 mètres de hauteur, renforcés par des tours, la rendaient imprenable. La piste d’accès, très étroite selon d’autres voyageurs, nous dissuade d’y accéder et nous observons ses ruines depuis la plaine.
Poursuivant notre route nous voyons de plus en plus de maisons typiques du Pamir, carrée ou rectangulaires à toit plat avec un léger dôme central dôté d’une ouverture qui apporte la lumière et permet la ventilation.

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Les arbres fruitiers sont toujours présent malgré les 2'600 mètres d’altitude et des abricotiers chargés de beaux fruits nous font saliver.

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La finesse des réseau d’irrigation, qui finissent par une entrée dans les champs tous les 30 centimètres, suscite notre admiration.

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Nous longeons également des réseaux de distribution d’eau, avec bornes, rénovés avec l’aide de la coopération suisse.

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Après avoir traversé une zone plus rocheuse, où la piste s’éloigne de la rivière offrant de beaux panoramas, nous arrivons en fin de journée vers le village de Zumudg. Alors que nous nous arrêtons au bas d’une allée d’arbre qui conduit au village, un beau vieillard nous dit de nous rapprocher du village et de nous installer à proximité de l’école.

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Son petit-fils Ismat, qui parle quelques mots d’anglais survient et confirme l’invitation. Nous parquons donc Babar sous des pommiers, en bordure du mur qui ceint le préau de l’école. Ismat nous guide ensuite pour une belle visite à travers le village dont les rues, suivies ou coupées par des canaux d’irrigation, serpentent entre les maisons et les murs limitrophes. Les jardins, bénéficiant chacun d’une arrivée d’eau, sont magnifiques, emplis de légumes et de fleurs.

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Ismat nous présente à de nombreux habitants qui nous accueillent en souriant comme une petite attraction.

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Nous visitons sans succès deux petites épiceries du village à la recherche d’un chapeau traditionnel de femme. Alors Ismat lance un appel à un groupe de femmes que nous rencontrons et 3 ou 4 couvre-chefs sont proposés et essayés.

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Nous sommes salués par la mère d’Ismat et sa famille

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puis rencontrons sa grand-mère paternelle Shahrifa qui nous offre un pain tout frais selon la coutume russe.

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Un deuxième pain arrive de la famille de la mère qui habite une autre maison.

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Nous sommes invités partout et suivons finalement Shahrifa qui s’affirme comme chef de famille. Nous découvrons l’intérieur d’une maison typique du pamir qui a été construite récemment par l’oncle d’Ismat. Après une ancienne partie de 4 mètres sur 6 utilisée comme entrée et chambre à coucher sur un côté, nous pénétrons dans la pièce centrale qui mesure au moins 8 mètres sur 8. Le plafond est constitué d’une superbe poutraison massive magnifiquement taillée dont le centre est fait de carrés superposés croisés à 45°. Qui aboutissent à une verrière centrale d’un mètre sur un permettant l’éclairage et la ventilation. Les côtés de la pièce sont surélevés de 50 cm par rapport au centre de 4 mètres sur 4 délimité par 4 piliers massifs. Ces banquettes peuvent devenir autant de lit et une pile de tapis et de couverture est déposée dans un angle de la pièce.

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Une complicité s’installe rapidement entre Sylviane et Shahrifa qui n’ont que dix ans de différence.

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Pendant nos premières discussions, la tante d’Ismat s’affaire fébrilement dans un angle de la pièce puis rapidement une nappe est mise sur la table ronde basse que nous entourons et le pain tout chaud est apporté. Chacun reçoit un bol de yoghourt frais d’au moins 3 dl. Le thé est servi à profusion dans de petite coupe tandis que nous dégustons ce copieux et excellent premier plat. Ce sont ensuite deux grands plats de « patokartof » mélange de pâtes et de pommes de terre qui sont posés sur la table avec un bol de cardamone fraîche du jardin pour assaisonner nos « patokartof ». Le tout est complété par un plat de biscuits et nous sommes rapidement rassasiés dans une ambiance très conviviale malgré la barrière des langues.

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18 août 2018 Zumudg - Khargush
Pendant la fin de soirée Sylviane a imprimé quelques photos des personnes rencontrées pour leur offrir ces beaux souvenirs avant de les quitter. La journée commence donc par la remise de ces photos et par une visite de Babar par ceux qui nous ont accueillis rejoints par d’autres habitants du village.

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Vers 9 heures nous quittons cette communauté accueillante et sympathique pour reprendre notre piste le long du corridor du Wakhan. Le grand-père d’Ismat, qui m’a embrassé, ému aux larmes lorsque je lui ai remis son portrait, est là pour nous dire au revoir.

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Les sommets de l’Hindukush nous toisent du haut de leurs 6'000 à 6'900 mètres pour le plus haut d’entre eux, le Lunkho e Dosare.

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En fin de matinée nous arrivons à Langar, village où le Panj prend sa source par la réunion des grosses rivières Pamir, au nord de la chaîne des Wakhan qui culmine à 6'320 mètres, et Wakhan au sud de celle-ci. Le bourg nous surprend par sa faible dimension et son manque d’infrastructure.

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A sa sortie, nous partons à l’assaut d’épingles à cheveux coincées entre les maisons qui doivent nous faire grimper de 300 mètres de dénivellation. Les virages sont très serrés, mais Babar passe sans manœuvre à une exception près.

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Soudain, entre deux épingles un vieux camion descendant, chargé de fourrage, nous fait face. Pas de place pour deux et je lui demande de reculer sur une centaine de mètres pour pouvoir croiser.

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C’est alors qu’un des hommes me dit : "No benzin". Je n’y crois pas… ils descendent en roue libre.
Je recule une cinquantaine de mètres, à un endroit un peu plus large, car l’épingle d’en-dessous est ouverte par une fouille et ne permet pas le croisement. Babar plaqué au mur et à la palissade bordant le dévers de la propriété aval, je fais signe au chauffeur de passer. Le début du croisement se passe bien mais un gros caillou côté amont incline le camion dont les ridelles frottent tout à coup Babar et arrachent la cheminée du chauffage.

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Je crie stop ! et dégage notre véhicule lentement en braquant pour dégager l’arrière. Bilan : cheminée du chauffage partiellement arrachée et grosses raies sur l’arrière du pachyderme.

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Nous sommes dans un pays où il n’y a pas d’assurance obligatoire et chacun reprend son chemin. Au sommet de la côte nous faisons l’arrêt casse-croûte et remettons un nouveau couvercle de cheminée.
Nous poursuivons ensuite sur la piste qui grimpe sur le flanc de la rivière Pamir.

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La déclivité est moindre et les paysages superbes.

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Nous quittons peu à peu la verdure et la piste se détériore progressivement, mais heureusement les ponts en béton sont corrects. Tournant le dos à l’Hindukush nous progressons dans un univers minéral alors que la vallée de la Pamir se rétrécit.

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La rivière se cache au fond de gorges profondes. Après une trentaine de kilomètres le relief s’assouplit et la vallée s’élargit à nouveau, la rivière divaguant dans son fond. Mais sur la piste c’est un enfer de tôle ondulée que Babar doit endurer. Après une trentaine de kilomètres vibrants, un bruit nous arrête sur le bord de la piste, près de la rivière frontière. Les deux boulons de tête d’amortisseur sont cassés ! L’amortisseur droit, auquel j’avais mis un colson est à peu près en place, mais le gauche s’est couché contre la roue, rebondissant et arrachant sa bouteille qui en a fait trois fois le tour, heureusement sans arracher le tuyau. Il ne reste qu’à réparer, ce qui est fait en 2 heures de temps, mais les pièces commencent à manquer et les entretoises sont bricolées…

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Pendant que nous réparons, à 20 mètres de la rivière qui est de même largeur, 8 cavaliers lourdement chargés passent à une centaine de mètres sur l’autre rive. Il ne faudra donc pas passer la nuit ici, dans une zone frontalière connue pour ses trafics y compris de drogue, et non surveillée par l’armée tadjike.

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C’est ce que nous expliquons à des jeunes du Rally Mongol qui réparent leur Fiat un peu plus loin. Réparation faite nous rejoignons le poste de contrôle militaire, à 30 km, au crépuscule.

19 août 2018 Khargush - Alichur

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Après les stress d’hier on se la joue cool aujourd’hui. Réflexion sur les ruptures répétées de boulons de tête d’amortisseur, ils doivent être réglés trop durement et reportent les chocs dans les boulons au lieu de les amortir. Donc je règle les amortisseurs à 20 crans sur 40 sur les deux côtés. Je diminue aussi la pression des pneus avant à 4,5. J’en profite pour faire un petit tour d’entretien et constate une fois de plus que Babar ne consomme pas d’eau mais toujours son demi-litre d’huile par 1'000 km. Pendant que je fais ces opérations un gars me demande si j’ai de l’huile à lui donner et je réponds non. Il demande alors si j’ai quelques litres de diesel et je lui en donne 6 ou 7. Il disparaît ensuite au-delà du poste de contrôle militaire situé à 300 mètres.
Nos voisins pour la nuit étaient les équipages de trois petites voitures du Rallye Mongol 2018. Ce rallye à but partiellement humanitaire n’est ouvert qu’à des petites voitures de cylindrée inférieure à 1'200 cm3. Ce sont majoritairement des jeunes concurrents qui tente de relier Prague à la Mongolie, généralement dans des voitures surchargées. Il n’y a pas d’assistance et chacun choisi son itinéraire entre quelques passages obligés. Je parle un peu du danger d’inciter des jeunes à traverser des contrées difficiles avec ces petites voitures avec un des italiens rencontrés la veille… Il me signale que le gars qui m’a demandé du mazout a disparu avec deux douilles de clefs à cliquets qu’il lui a empruntées. Nous comprenons le stratagème…

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Vers 11 heures nous quittons Kargush en direction du nord et du col du même nom à 4'344 m. La piste est de qualité moyenne, difficile par endroit, où il faut aller lentement. Pas de village ou de végétation sur les 40 kilomètres qui nous séparent de la route M41, qui relie Khorog à Murghab, mais de montagnes et des lacs salés.

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Sur la fin de ce parcours nous découvrons certains restes de tronçons pavés avec des pierres du coin, peut-être la trace d’un ancien goulag soviétique, ces camps de travail que Staline a créés à profusion.

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Nous faisons le casse-croûte à proximité de la M41, dans un superbe panorama.

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En début d’après-midi nous nous lançons, après 2 kilomètres sur l’asphalte, sur une piste en direction du lac Yashil Kul , dans une belle vallée où se trouvent les ruines d’un caravansérail. Mais lors d’un contrôle après une douzaine de kilomètres de piste, le boulon de tête d’amortisseur avant-gauche est porté disparu.

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Arrêt réparation, cette fois il faut limer deux rondelles car il n’y en a plus à la taille.

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Je diminue encore la dureté des amortisseurs avant. Les pièces de rechange étant bientôt épuisées, mieux vaut faire demi-tour après la réparation et regagner la route. Nous prenons alors calmement la direction d’Alichur, sur le haut plateau du Pamir, sur une route irrégulière. Parfois excellente sur quelques kilomètres, puis déformée jusqu’à 20 cm de profondeur par les sillons des roues de camions. D’autrefois l’usure a disloqué l’asphalte et créé de beaux trous.

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Nous atteignons le village au crépuscule et nous installons à son entrée pour la nuit.

20 août 2018 Alichur - Murghab
Beau, 13°C à 9 h après 3°C pendant la nuit.
Démarrage vers 9 heures, sur la route irrégulière qui longe cet immense plateau à 3'800 mètres. Seule une source d’eau limpide tranche dans la grisaille des pierres et de la verdure du fond de vallée.

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Dans les zones les plus humides de la plaine la récolte de fourrage mobilise les forces humaines pour la coupe et animale pour le transport. De rares maisons ou yourtes isolées héberge les éleveurs de ces hautes contrées.

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Nous nous élevons insensiblement vers le col Neizatash Pass à 4'134 mètres. Nous contrôlons nos boulons à tour de rôle tous les dix kilomètres, l’un d’entre eux plie mais ne rompt pas.

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En redescendant contre Murghab un magnifique léopard des neiges en ciment nous salue d’un rocher.

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La vaste pleine qui précède la localité est arrosée par la grande rivière Aksu qui fait verdir les prairies. Un troupeau de magnifiques chevaux se régale sur les berges.

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Avant l’entrée de la localité les policiers d’un poste de contrôle inscrivent nos pédigrées dans un même grand cahier que leurs prédécesseurs et nous ouvrent la barrière avec le sourire.

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A nous Murghab, la deuxième ville du GBAO, chef-lieu du haut-plateau du Pamir avec ses 7'000 habitants et… ses montagnes de pièces de rechange. Premier arrêt, avant l’entrée du bourg, vers un mécanicien pour voir si nous trouvons des boulons M14 par 120.

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Accueilli avec le sourire je suis emmené dans la remise où deux trois récipients hétéroclites contiennent de la vieille visserie. Nous ressortons bredouille pour aller vers un grand coffre militaire en aluminium posé à côté de la maison. Le couvercle est déverrouillé et nous cherchons pour finalement trouver quelques rondelles et 4 boulons de M12… ça peut servir, ne faisons pas les difficiles. Nous reprenons la route pour le centre et le bazard où peut-être… Celui-ci est un vaste alignement de containers dont la moitié est fermée en cette fin d’après-midi. Les trois visités qui offrent des articles de quincaillerie n’ont que de la petite visserie.

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Un homme parlant trois mots d’anglais me salue cordialement à l’entrée du bazard et me demande ce que je cherche. Après explication il m’explique où habite le master mécanicien et interpelle un autre homme qui va dans la direction pour qu’il m’y conduise. La maison se signale par un amas de ferraille en bord de rue en guise d’enseigne. Des vieilles caisses de side-car, carcasses de lits, ferrailles de toute sorte trônent à côté d’une antique grosse génératrice sur un châssis de remorque pour permettre la soudure électrique.

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Le maître est sur le toit, avec deux enfants, et m’accueille en me faisant entrer dans sa cours intérieure derrière la maison. Là je comprends enfin ce que veut dire récupérateur (avis aux moqueurs du village) : la cours, de 6 mètres sur 10, est remplie de tas de ferraille de toute sorte, il y a un petit chemin qui permet d’aller au four à pain et d’accéder à trois remises mais le reste est totalement encombré. Une des remises contient outre la ferraille, du foin et du pain sec. La visserie est dans des baquets, sacs ou caisses que nous vidons sur une toile pour trier. Encore choux-blanc, pas de M14. Je repars avec deux bouts de ferraille d’un diamètre approchant 14, quelques rondelles épaisses qui pourraient faire des entretoises et 50 centimètres de tuyau d’eau galvanisé qui pourrait être pour le même usage. Nous installons Babar pour la nuit, sur une place recouverte de gravier en bordure de la plaine, en contrebas du marché.

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21 août 2018 Murghab - Lac Karakul
Vers 7 heures du matin nous assistons, en déjeunant, à la sortie de la prière du matin qui s’est déroulée à la mosquée, à 300 mètres de Babar. L’affluence est impressionnante avec sûrement près de 200 hommes, principalement d’origine kirghize au vu de leur chapeau, qui sortent de l’édifice.

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Après une nuit calme je fais l’inventaire de ce que j’ai trouvé pour réparer éventuellement Babar.

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Je décide de retourner chez le maître pour compléter mon assortiment et il me donne quelque grosses rondelles carrées refusant l’argent, sans doute les 7 ou 8 francs données la veille étaient-ils généreux. Cet homme est sympathique, et sans doute un excellent réparateur disposant du seul poste à souder de la ville. Un nouveau tour du bazar, après une balade en ville en attendant l’ouverture, ne donne rien de plus.

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Les maisons du bourg, à un seul étage, sont généralement bien entretenues, souvent blanchies à la chaux, et les rues sont propres.
Vers 9 heures nous partons en direction du nord et du lac Karakul. Lénine nous salue en quittant le centre et nous retrouvons la M41.

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A quelques kilomètres de la ville, un pont emporté par une crue, nécessite un passage à gué dans une rivière qui n’ose plus couler depuis son méfait. La piste s’incline au nord-ouest et nous avançons parallèlement à la frontière chinoise située sur les montagnes à dix kilomètres sur notre droite. Les couleurs des montagnes, qui superposent des couches géologiques variées sont superbes sous le soleil.

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Nous apercevons la clôture établie par les soviétiques au moment des conflits territoriaux avec la Chine dans la région du fleuve Amour. Les poteaux de bois et les barbelés encore bien tendus nous accompagnerons sur une bonne cinquantaine de kilomètres. Les camps militaires ont par contre été abandonnés, et se disloquent, depuis le retrait des troupes russes.

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Les cinq derniers kilomètres qui permettent de franchir le col de l’Alabaltal, à 4'655 mètres sont en rampe assez prononceées et les dernières plaques d’asphalte nous laissent leur bon souvenir.

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Au sommet du col nous trouvons 2 couples de cyclistes de notre âge qui se reposent de cette montée éprouvante. Chapeaux bas !

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La piste est bonne à la descente en direction du lac située à 3'920 mètres à une cinquantaine de kilomètres plus au nord.

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Elle nous offre, sur l’un de ses bas-côtés, les ruines assez bien conservées d’un caravansérail. L’édifice est reconnaissable à sa disposition en U et à son nombre de pièces. Il domine le fond de la plaine où divague la rivière d’une trentaine de mètres et est adossé à la pente. Ses murs de pierres maçonnés soutiennent des voutes solides qui portent le toit plat étanché avec de la terre. Un mur, du côté de la rivière, constituait une enceinte close avec le bâtiment et ses deux ailes.

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Tous les 5 à 10 kilomètres quelques bâtiments ou yourtes signalent la présence des éleveurs dont on aperçoit les troupeaux, de yacks ou de moutons.

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Après avoir traversé la vallée sur une digue entourée, et déstabilisée, par les nappes turquoises de sources minéralisées, nous contournons une petite montagne grise pour découvrir le somptueux panorama du lac Karakul et des sommets qui l’entourent.

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Côtés Nord et Ouest ce sont les montagnes de la chaîne Alai Range, dont le pic Lénine à 7'134 mètres, tandis qu’au Sud les sommets de la Muzkol Range culminant à plus de 6'000 mètres garnissent l’horizon. Rassurons-nous, le lac ne peut s’écouler à l’Est où les sommets de la Sarykol Range font frontière avec la Chine, seulement aux environs de 5'000 mètres. Nous stoppons pour la nuit dans ce lieu magique, à deux kilomètres avant le village de Karakul entre la piste redevenue route et le lac.

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22 août 2018 Lac Kara-Kul (Tadjikistan) - Sary Tash (Kirghizstan)
Beau, 16°C à 8 h 30, après 1°C pendant la nuit.
Réveillés vers 6 h 30, nous avons la chance d’admirer cet encerclement de sommets enneigés sans aucun nuage mais atténué par une légère brume. Après ce déjeuner panoramique, Babar fume un peu blanc au démarrage mais ne renâcle pas à l’ouvrage.

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Nous devons contourner le lac Karakul par le Nord-Est pour atteindre la frontière kirghize. Le lac s’est formé il y a des millions d’année, semble-t-il dans la cuvette créée par la chute d’une météorite. Le lac, situé à 3'920 mètres d’altitude, couvre une surface de 380 km2 et est divisé en deux bassins par une péninsule partant de la côte sud en direction du Nord, prolongée par des îles. Son bassin Est, près duquel nous avons dormi, ne dépasse pas 19 mètres de profondeur, le bassin Ouest atteignant 238 m. Le lac est très salé, malgré les nombreux cours d’eau issu de la fonte des glaciers qui l’alimente, il n’a a pas de poissons qui peuvent y vivre.
Nous dépassons le village qui porte le nom du lac et qui est dominé par un grand camp militaire abandonné qui jouxte l’interminable clôture de barbelés.

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Les conditions de vie en hiver doivent être éprouvante avec des températures qui descendent facilement en dessous de -40°C. La plaine qui entoure le lac est désertique, parcourue par de rares troupeaux de moutons. La surface de l’asphalte ressemble à celle du lac, mais les vagues y sont plus grosses que sur ce dernier.

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La route se désagrège jusqu’à devenir piste puis retrouve des extraits d’asphalte et nous redescendons dans une cuvette qui précède le dernier col, qui marque la frontière, le Kizil Art à 4'336 mètres. Dans les derniers kilomètres qui précèdent le col nous dépassons une douzaine de cyclistes sportifs de tous âges et leurs véhicules d’accompagnement.

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Les rampes sont sévères avant l’arrivée à la douane tadjike et l’effort se lit sur les visages. Les militaires sont peu empressés et nous demandent d’attendre dans nos véhicules. Après un quart d’heure d’attente un officier des douanes arrive, se présente et prend nos passeport pour aller activer la manœuvre. Dans un deuxième bureau on nous demande de rendre un papier que nous n’avons jamais eu, puis nous passons rapidement le point de contrôle vétérinaire. Enfin un dernier contrôle des passeports est effectué et la barrière levée sans que nous ayons eu à ouvrir Babar. Le col qui marque la frontière est à quelques centaines de mètres au-dessus tandis que la douane kirghize est à une trentaine de kilomètres, au début de la plaine.

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Le col franchi c’est une descente, sur sol glaiseux heureusement sec aujourd’hui, en toboggan qui nous attend. Nous sommes très contents des conditions météo qui permettent de franchir quelques épingles à cheveux glaiseuses qui pourraient être dangereuses, avec notre poids, en cas de pluie. Quelques aqueducs pourris assaisonnent notre descente.

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Au bas du toboggan, qui nous a fait perdre 250 mètres d’altitude sur 2 kilomètres se trouve un hébergement qui doit être apprécié des cyclistes. La piste descend sur plusieurs kilomètres entre des flancs sujets à glissement de terrain.

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Après le casse-croûte, passage de la douane kirghize avec un accueil cordial et un jeune fonctionnaire parlant anglais. Nous roulons 5 kilomètres et constatons lors du contrôle au début de la plaine de Sary Tash qu’un boulon est cassé. Excellente raison pour décréter le bivouac en espérant des montagnes dégagées au matin.

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NOUS N'OUBLIERONS JAMAIS CET ACCUEIL …
des enfants, comme des adultes !


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